L’équipe aime mettre à l’honneur les entreprises engagées. Cette semaine, nous partons à la rencontre de Sidonie Dumoulin, co-fondatrice de la marque Thelma-Rose qui s’engage à créer des vetements 100% made in France.
Consommer moins mais mieux permet à chacun de s’engager pour un dressing responsable !
Sidonie, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Il y a maintenant 10 ans, nous avons créé avec ma sœur Stéphanie notre marque Thelma Rose. L’enjeu est de proposer une autre manière de consommer le vêtement.
Nous revisitons les basiques de la garde-robe féminine : le débardeur, la jupe longue ou la petite robe noire, des pièces qui nous accompagnent en toutes occasions et ce, saison après saison.
Que veut dire créer un vêtement plus durable ?
Ce sont des lignes intemporelles, la qualité des matières mais aussi les bienfaits sur la féminité et le bien-être.
Parallèlement, nous aimons bousculer les codes d’une industrie textile opaque et dysfonctionnelle. Pour nous, pas d’obsolescence programmée des vêtements, pas d’effets de mode, de prix psychologiques ou de fabrication à l’autre bout de la terre ! Nos matières, sourcées en France et en Italie, sont certifiées Oeko-Tex. Nous sommes d’ailleurs en cours de labellisation Origine France Garantie. En d’autres termes, nous prônons une mode durable, juste et infiniment agréable. Rien que du bon sens !
Derrière toute aventure entrepreneuriale, il y a une histoire, peux-tu nous raconter ton parcours ?
Tout d’abord, Stéphanie et moi avons grandi dans une ambiance entrepreneuriale et familiale, cela nous a sans doute donné certaines clés. Plus jeune, je dessinais beaucoup. J’entrainais mon coup de crayon en copiant soigneusement des croquis de mode récupérés chez le couturier Louis Feraud. J’adorais cela ! Les courbes, la structure des lignes, l’élégance ou la désinvolture de la haute couture me faisaient rêver.
Plus tard, je me suis orientée vers le marketing et la communication, un choix fait un peu par défaut et pourtant ! En 2000, alors que j’habitais à Londres, je suis partie faire le tour du monde en sac à dos. De Calcutta à New-York en passant par Katmandou ou Sydney, j’ai enchainé des moments très durs, drôles ou sublimes.
Cette succession d’étapes toutes intenses m’a livré une vision du monde inquiétante et notamment d’un point de vue environnemental. Ce voyage n’a cessé de guider mes actes. Thelma Rose n’est en rien un hasard.
Tu décris ta marque comme un dressing minimaliste, quel message souhaites-tu faire passer à travers cette définition ?
Savez-vous que nous ne portons que 30% de notre dressing. Autrement dit, 70% de ce que nous achetons reste au placard. Pour nous, le message essentiel est : acheter moins mais mieux ! Outre le critère du style propre à chacun, un « bon » dressing minimaliste doit répondre à 2 fondamentaux.
- La qualité ! Et par cela, j’entends qualité des coupes, des matières, des finitions et qualité de production ! Un bon vêtement est celui dans lequel on se sent bien, celui que l’on prend plaisir à porter saison après saison !
- L’autre critère étant celui de la durabilité. Le vêtement ne doit pas se déformer après une utilisation ni même perdre ses coutures ou encore s’effilocher après 3 lavages ! Racheter par exemple son petit débardeur noir à chaque saison n’a pas de sens ! Ce n’est d’ailleurs ni économique ni écologique !
De même, tu parles d’une marque 100% féminine, sens-tu un changement dans la demande des consommateurs ?
Les femmes et les hommes prennent de plus en plus conscience de l’impact de leurs gestes et de leur consommation. C’est indéniable ! Cela étant, passer de l’intention à l’acte prend parfois du temps car cela nécessite de revoir nos modes de consommation dans une société qui nous a habitué à acheter un tee-shirt moins cher qu’un sandwich.
Sortir des sillons tracés par les marques « mass-market » (ndlr : marché de masse) n’est pas si évident. Cette transformation pose aussi la question de la visibilité. Nous ne sommes présents sur aucune colonne Maurice et n’avons pas de pleine page dans le magazine ELLE (malheureusement…). Aujourd’hui, il y a pourtant une vraie « contre-proposition » avec un écosystème de marques incroyables.
Tu parles souvent de votre modèle économique : la DNVB. Peux-tu préciser ?
Thelma Rose est en effet une DNVB (vertical native digital brand), autrement dit, une marque digitale. Aujourd’hui, l’essentiel de notre distribution se fait en direct via notre e-shop .
Réduire les intermédiaires nous permet de rendre la qualité la plus accessible possible. Ce modèle nous permet aussi d’être au contact de nos clientes, ce qui est assez génial à vivre car nous entretenons une relation très humaine et pleine de bienveillance avec des femmes qui se reconnaissent dans nos valeurs et qui ont à cœur de prendre part à notre aventure.
Qu’est-ce que la « slow-fashion » ?
La slow fashion ou mode lente incarne un mouvement invitant à se concentrer sur l’essentiel et à acheter de manière consciente.
Elle vise la qualité plutôt que la quantité. Elle est aussi une mode respectueuse de l’environnement et des personnes travaillant sur la chaine de production. A l’évidence, la slow fashion s’oppose à la fast fashion, cette mode rapide, jetable, basée sur l’hyperconsommation du vêtement tout comme la slow food s’oppose aux fast food.
Si tu avais un message pour les lecteurs de L’Optimisme, quel serait-il ?
Lors du premier confinement, nous avons martelé qu’il n’était plus possible d’acheter tout, tout le temps, à n’importe quel prix parce que justement cela n’a pas n’importe quel prix et nous commençons tout juste à le payer. Je pense sincèrement que nous sommes tous responsables de nos actes. Comme dirait le slogan écologique, « il n’y a pas de petits gestes lorsque nous sommes 67 millions à les faire. »
Si l’on en croit les chiffres, le secteur du textile est le 2e secteur le plus polluant avec la production de plus de 100 milliards de vêtements : pollution de l’air, de l’eau et des terres sans parler de la pression sur les ressources naturelles, de la problématique aiguë des poubelles pleines de textiles ou même du droit du travail dans les pays du sud. Avec sa carte bleue, le consommateur a un pouvoir immense : celui d’agir pour notre société de demain.