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Se rétablir d’un trouble psychique : ça veut dire quoi ?

Se rétablir d'un trouble psychique ça veut dire quoi

Se rétablir d’un trouble psychique, c’est possible ! Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ? Le concept de rétablissement, processus propre à chacun qui permet, malgré une maladie psychique, de vivre une vie pleinement satisfaisante, prend de plus en plus d’ampleur dans les discours et les pratiques en psychiatrie.

Le rétablissement implique de changer de regard sur les troubles psychiques et de se distancer d’une conception pessimiste qui a longtemps été dominante dans ce champ, celle selon laquelle les maladies psychiatriques engendreraient inexorablement une aggravation des situations médicales ou sociales des individus. 

Dans cette interview nous faisons le point sur le concept de rétablissement avec le Dr Nicolas Rainteau, psychiatre et auteur du livre « Soyez Rehab » (Elsevier Masson, novembre 2022) pour qui la psychiatrie doit changer de paradigme en offrant aux personnes souffrant d’un trouble psychique les moyens d’accomplir leur projet de vie. 

Nicolas Rainteau

Nicolas Rainteau

Psychiatre et Auteur du livre "Soyez Rehab"

Peux-tu te présenter en quelques mots ? Qu’est-ce qui t’a donné envie de devenir psychiatre et qu’est-ce qui te rend heureux dans ce métier ?

Je m’appelle Nicolas, j’ai 36 ans.  Originaire de la région parisienne, où j’ai fait l’externat de médecine. Je suis parti faire l’internat de psychiatrie à Montpellier et c’est encore ici que je vis. Amoureux absolu de la montagne qui est l’endroit où je me sens le mieux et qui me permet de pratiquer les activités que j’aime (rando, trail, ski de rando, alpinisme).

D’autant que je me souvienne j’ai toujours voulu faire psychiatre. Malgré un parcours scolaire pas évident et des résultats dans les matières scientifiques plus que médiocres ! Mais j’ai toujours eu l’impression très subjective que c’est dans ce métier que je pourrai exprimer au mieux mes qualités. 

Au quotidien ce qui me plait le plus, c’est d’être le témoin de parcours de vie qui, malgré tous les obstacles, aboutissent. Cela donne beaucoup d’espoir pour la vie de manière générale. 

Quelle est ta vision de la psychiatrie ? Comment a-t-elle évolué depuis ces 50 dernières années ? Parler de rétablissement, est-ce nouveau dans ce champ ?

Je ne sais pas si j’ai réellement une vision de la psychiatrie. Personnellement j’ai une pratique pragmatique de la psychiatrie. Les personnes concernées par une maladie psychique ont des objectifs et nous sommes là pour essayer au maximum de lever les obstacles qui se mettent sur leur route. Sans présumer de la réussite, des outils à utiliser ou des frontières de nos métiers.

J’ai une culture psychiatrique et une connaissance de son histoire peu développée, mais depuis 50 ans tout a évolué. La connaissance sur les causes des maladies, la recherche, les outils médicamenteux et non médicamenteux etc. Après c’est toujours pareil, au service de quoi et de quels objectifs met-on ses avancés ?


Je pense que les personnes concernées ont toujours parlé de rétablissement. Le changement c’est que les soignants commencent à prendre en compte cette parole.  Est ce que cela aurait du être toujours une évidence ? Oui. Est-ce qu’en 2023 on est encore loin du compte ? Oui.

Qu’est-ce que ça veut dire au juste « se rétablir d’un trouble psychique » ? Quelle définition en donnes-tu ? D’ailleurs, est-ce logique de demander à un psychiatre une définition du rétablissement ?

On peut demander sa définition du rétablissement à un psychiatre. C’est même plutôt intéressant je trouve. Sa réponse donnera plein d‘information sur sa pratique.

Pour moi il y a autant de définition du rétablissement qu’il y a de personnes concernées. 

Pour certains cela passe par les relations aux autres, d’autre le travail ou un déménagement. Bref chacun a sa définition en fonction de qui il est et de ce qu’il vise.

C’est profondément personnel de se sentir rétabli.

Est-ce que pour toi tout le monde peut se rétablir d’un trouble psychique quel qu’il soit ? On entend encore que ce n’est pas toujours possible…

Si on prend la définition de la question précédente, alors la réponse est oui sans aucune hésitation. 

Quand on juge que ce n’est pas toujours possible c’est généralement qu’on a voulu imposer une définition bien précise du rétablissement à la personne. Une définition souvent éloignée de la sienne.

Après évidemment que le parcours peut être semé d’embuches, qu’il est fait de hauts et de bas et que la maladie psychique est un sacré adversaire. 

L’un des piliers du rétablissement est l’optimisme. Pourquoi est-ce une valeur centrale ?

Pas de rétablissement sans optimisme et sans espoir d’un ailleurs meilleur. Mais pas que pour la personne concernée. Cela englobe l’entourage et les soignants. Tout le monde doit être optimiste.

Mais attention ce n’est pas une injonction et il ne faut pas nier le sentiment de détresse et les difficultés à se projeter dans autre chose qui sont parfaitement normal.

Chacun fait comme il peut et à son rythme. C’est surtout cela qu’il faut respecter. Et à nous de remettre de l’espoir quand il a un peu disparu, quelle que soit la raison.

Comment fait-on, quand on est soignant ou proche, pour donner de l’optimisme aux personnes qui souffrent d’un trouble psychique alors que pour le moment elles ne voient pas le bout du tunnel ?

Je trouve qu’au quotidien c’est le plus dur. Accompagner des projets, lutter contre des symptômes ou d’autres obstacles est plus ou moins facile mais généralement on y arrive. Mais quand il n’y a plus d’espoir cela se complique. Encore une fois il faut déjà respecter cette période.

Personne ne veut ne plus avoir d’espoir, donc si c’est le cas c’est que c’est surement justifié. Après il faut comprendre d’où cela vient pour y répondre au mieux. Est ce à cause d’échecs ou de rechutes récents ? Est-ce parce qu’on a jamais ouvert la porte aux projets et que donc la personne ne se projette plus ? Est-ce parce que la peur des aidants et soignants a pris le dessus ? En fonction de la cause il faut agir sur différents leviers.

Après comme pour beaucoup de choses, rencontrer des personnes qui peuvent témoigner que oui c’est possible aide beaucoup.

N’est-ce pas un peu « naïf » de parler d’optimisme en santé mentale quand on sait que certains troubles psychiques peuvent engendrer des handicaps sévères dans la vie de certaines personnes ?

L’idée n’est vraiment pas de sous estimer les maladies psychiques et leur impact. On le sait que les obstacles sont multiples. Par contre il serait faux de dire que nous savons exactement ce qu’il se passera quand une personne se lancera dans un projet. En fait il ne faut jamais présumer de l’issu d’un projet. Parce qu’en vérité on n’en sait rien tant qu’on n’est pas dedans ! Et puis qui sommes-nous pour dire à une personne ce qu’elle doit faire de sa vie ou pas ?  Qui sommes-nous pour fermer arbitrairement des portes ? Attention ce n’est pas une injonction à l’optimisme ou à faire forcément des projets. Juste à respecter l’envie et les aspirations des personnes. Je pense que quelle que soit la sévérité d’un handicap, si on remet du sens alors tout devient un peu plus facile.

Quelles sont pour toi les conditions qui permettent de favoriser le rétablissement des personnes en santé mentale ?

Laisser les gens rêver et y croire. Car ils ont raison ! Ne jamais dire non à un projet. Ne jamais présumer. Je jamais mettre l’espoir sous cloche. C’est la base. Après pour les proches ou les soignants ne doivent pas céder à la peur de la rechute ou de l’échec. 

Et enfin créer un environnement propice au rétablissement en communiquant, en luttant contre la stigmatisation et créant des partenariats multiples et variés.

Protéger de la vie n’a jamais protégé de la maladie.

Nombreux sont nos lecteurs qui ont été diagnostiqués avec un trouble psychique et qui traversent des périodes très difficiles, tu aimerais leur dire quoi en tant que psychiatre ?

Bravo car vous êtes des modèles de résilience et d’abnégation ! C’est très inspirant pour soi même d’être témoin de ça. Surtout continuez de rêver en grand et en couleurs. Il y a des moments terriblement durs mais je reste persuadé que tout est possible. Ne laissez personne vous en faire douter.

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Commentaires

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  1. Bonjour.
    Bravo pour vos informations. En plein parcours réhabilitation depuis 16 mois à Clermont Ferrand, je vous rejoins sur vos remarques. J essaie d écrire également un « recueil » sur le sujet,mon parcours de vie.. et vos notes me sont précieuses….Merci.
    A bientôt peut-être.
    Christian

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