Solveig Vinamont s’engage depuis plusieurs années auprès de WAPA, une association qui lutte contre l’utilisation d’enfants dans les conflits armés. Dans cette interview, découvrez son engagement remarquable et son parcours inspirant ainsi que les missions de WAPA qui œuvre partout dans le monde.
Peux-tu nous présenter l’association WAPA ? Quelles sont tes missions à WAPA ?
WAPA signifie War-Affected People’s Association. Nous luttons contre l’utilisation d’enfants dans les conflits armés et pour leur réintégration au sein de communautés renforcées.
Au Sud, WAPA collabore avec des partenaires locaux dans des pays post-conflit ou en transition vers la paix et finance leurs programmes de réintégration.
Au Nord, WAPA mène des campagnes de sensibilisation et de plaidoyer sur la problématique des enfants soldats afin de mettre fin à leur recrutement (prévention, démobilisation, réintégration). Nous sommes présents en Ouganda, au Sri Lanka, en Colombie et en RD du Congo.
On a toutes plusieurs casquettes chez WAPA en raison de la petite taille de notre association. En ce qui me concerne, je suis co-fondatrice et co-déléguée à la gestion journalière avec Véronique et je suis responsable communication et plaidoyer.
Pourquoi t’es-tu engagée dans la lutte contre l’utilisation d’enfants dans les conflits armés ? Comment en es-tu arrivée là dans ton parcours professionnel ?
Un jour, dans une librairie de seconde main, un livre, posé sur une table à l’entrée, a attiré mon regard : « La petite fille à la kalachnikov » de China Keitsi. Le surlendemain ou presque, j’en faisais le sujet de mon mémoire. Ensuite, je commence à travailler dans une ONG internationale. J’ai la chance d’apprendre à connaître le secteur de la communication et le monde associatif, de partir sur le terrain et enfin de rencontrer Véronique.
On bosse vraiment bien ensemble, on se complète et on projette, un jour, de créer un projet à notre image. En 2013, c’est une seconde autobiographie d’un ex-enfant soldat que j’ai entre les mains et en refermant le bouquin, je me dis que ça suffit ! Je suis écœurée par l’inhumanité de l’Homme, indignée par cette bouleversante problématique qui touche des enfants partout dans le monde. Et si ça avait été les miens ? Entre-temps, je suis devenue maman. Mon cœur se déchire. Alors deux options s’offrent à moi :
- J’arrête de me plaindre et de m’apitoyer sur leur sort,
- Je fais quelque chose ! J’ai choisi la deuxième option ! Je propose cette idée un peu folle à Véro et 3 mois plus tard, on se retrouve dans un avion pour Entebbe en Ouganda pour notre premier projet !
Qu’est-ce qui te motive chaque jour dans ton travail au sein de WAPA ?
Même si on travaille beaucoup, je n’ai jamais l’impression de devoir aller au travail. J’adore ce que je fais. Tous les jours, j’ai le smile et je sais à quel point j’ai de la chance de faire ce métier, de vivre (de) cette passion. Une amie me demandait : quelle est ta passion? Je lui ai répondu : les gens, le monde et les injustices. La frontière « vie privée, vie professionnelle » n’est pas toujours très claire mais WAPA c’est notre bébé. Cerise sur le gâteau : j’ai la chance d’être proche amicalement et intellectuellement de mes autres collègues : ensemble, on a quand même souvent envie de déplacer des montagnes.
Enfin, une grande source de motivation provient du contact régulier avec nos partenaires locaux et de nos missions de terrain qui nous reconnectent à une réalité, celle des enfants soldats, celle de nos bénéficiaires. Parce que, même quand je pense être aguerrie, chaque mission de terrain me remet convenablement à ma place.
Peux-tu nous donner quelques informations sur la situation actuelle dans le monde concernant les « enfants soldats » ?
Plusieurs dizaines de milliers d’enfants soldats (garçons et filles) sont associés à des forces ou groupes armées dans une quinzaine de pays répartis sur trois continents : Amérique latine, Afrique et Asie. Ils sont exploités comme combattants, cuisiniers, porteurs, messagers, espions, à des fins sexuelles,… Ils sont recrutés de force ou sur base « volontaire » en raison de la pauvreté, la violence domestique, la vengeance, l’idéologie,…Enfin, ils nombreux, peu coûteux, manipulables et fragiles. On a souvent évoqué le nombre de 250.000 à 300.000 enfants. Ce chiffre pourrait être bien supérieur.
Peux-tu nous parler des réalisations de WAPA sur le terrain ?
J’ai envie de vous donner deux exemples : notre programme à l’est de la RDC et notre programme en Colombie.
Avec le programme en RDC, nous contribuons activement, d’une part, à réduire le nombre d’enfants associés aux forces et groupes armés en sensibilisant notamment les forces et groupes armés, les communautés et les enfants vulnérables et d’autre part, à soutenir leur réintégration communautaire en répondant à leurs besoins : prise en charge physique et psychologique, réunification familiale, scolarisation, formation professionnelle,… afin de les soutenir dans la réalisation de leur projet de vie et leur garantir la possibilité d’exercer enfin leurs droits.
En Colombie, notre programme d’art-thérapie propose aux adolescents démobilisés des guérillas et autres groupes armés, des séances de musique, danse, arts plastiques, théâtre, broderie… Bien plus qu’une simple distraction dans leur emploi du temps, elles permettent de développer des compétences aussi bien personnelles que sociales comme mieux se connaître, retrouver la confiance en soi, se découvrir des talents et explorer de nouvelles perspectives d’avenir au-delà du port d’armes, apprendre à contrôler son agressivité, développer sa tolérance, sa patience et sa concentration, panser ses blessures et aller de l’avant, apprendre à construire au lieu de déconstruire,…
Quel est ton plus bel accomplissement au sein de WAPA ? Si tu devais nous raconter un moment marquant depuis ton engagement ?
A différents niveaux, il y en a des tas ! Nous avons construit en Ouganda deux maternités, une école maternelle ; au Sri Lanka, nous avons scolariser des centaines d’enfants et soutenu leurs mères avec des activités génératrices de revenus. Sur le terrain, on fait la différence. Nos programmes sont davantage qualitatifs que quantitatifs et on l’assume. Nous organisons des événements fédérateurs, familiaux et conviviaux qui remportent souvent un beau succès. Mais l’un des plus bel accomplissement de WAPA est d’avoir été reconnue officiellement comme une organisation de la société civile par la Belgique. C’est évidemment la plus haute reconnaissance institutionnelle que l’on puisse avoir et qu’est-ce qu’elle nous fait du bien !
Comment peut-on aider WAPA dans sa lutte contre le recrutement d’enfants soldats dans le monde ?
En faisant un don unique ou mensuel, en participant à nos évènements sportifs ou culturels, en ouvrant votre réseau à WAPA, en partageant nos news, en devenant bénévole sur des évènements ou des campagnes de fin d’année comme Charidy, en devenant une entreprise solidaire,… TOUT EST POSSIBLE !
WAPA est le fruit de notre détermination et de notre passion mais ce sont toutes les personnes qui entourent WAPA depuis 8 ans qui la nourrissent et nous permettent d’accomplir notre mission. Alors : MERCI !