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De psychiatre à illustratrice de BD : la reconversion hors norme de Claire Le Men !

Claire Le Men a un parcours atypique qui prouve qu’une voie professionnelle n’est pas forcément toute tracée. Alors qu’elle termine ses études de médecine, Claire réalise que l’univers de la psychiatrie auquel elle se destine n’est pas tel qu’elle l’imaginait. Elle décide de repartir à zéro en suivant une formation d’illustratrice. Un changement d’orientation à 360 degrés qui a fait naître sa première BD intitulée « Le syndrome de l’imposteur : parcours d’une interne en psychiatrie ». Une reconversion incroyable à découvrir !

Claire, peux-tu te présenter en quelques mots ?

J’ai 29 ans, je suis autrice de BD et illustratrice. Avant ma reconversion, j’ai fait des études de médecine et je me suis spécialisée en psychiatrie. Au cours de mon internat, j’ai pris une disponibilité pour écrire un roman graphique sur le sujet. Lorsque j’ai repris mon internat, je me suis aperçue que j’y étais moins heureuse qu’en tant qu’illustratrice.

As-tu eu des prises de conscience au cours de ton internat en psychiatrie ?

Il y a eu plusieurs étapes. D’abord, je me suis rendu compte que je venais avec l’envie de guérir les gens. Or, en psychiatrie, on ne guérit pas les gens, on les soigne, car même quand on fait son maximum, on ne peut pas tout faire pour eux. Il y a les rechutes, la chronicité…J’avais l’impression de faire beaucoup d’efforts pour assez peu de résultats. C’est très différent de ce qu’on nous apprend en cours. On nous enseigne les traitements à donner aux malades mais rien dans les cas où les traitements ne fonctionnent pas. Contrairement à ce que j’imaginais quand j’ai choisi de devenir médecin, je me suis sentie très impuissante dans ce métier.

Qu’est-ce qui t’a le plus marquée dans le milieu de la psychiatrie au point d’envisager une reconversion ?

J’ai fait un semestre en tant qu’interne dans un hôpital universitaire. On parlait des patients devant eux comme s’ils n’étaient pas là. Avant, je mettais les psychiatres sur un piédestal. Dans ce stage en particulier, j’ai été déçue du corps médical. Il y a un côté très vertical médecin-patient. J’ai pensé que la hiérarchie entre les différents corps de métier serait moins présente. Pendant tout notre cursus, nous sommes comparés en permanence, on en souffre énormément. Il n’est pas rare de se faire humilier en tant qu’étudiant par les médecins chefs.

Une énorme part du travail consiste à gérer les conflits institutionnels. Je me suis sentie parfois très seule face au patient.

Quelle a été la réaction de ton entourage lorsque tu as annoncé ton désir de devenir illustratrice et de ne pas poursuivre ta carrière de psychiatre ?

Mon entourage proche n’était pas vraiment surpris. Pendant mon internat, j’avais déjà pris un an de césure pour réaliser des BD tout en faisant des petits boulots. Ceci dit, à part ma sœur, personne ne m’a dit que c’était une excellente idée. Mais l’opinion des gens n’était pas très importante à ce moment là car j’étais sûre de moi. Je l’ai dit aux gens une fois que tout avait été mis en place et que j’allais commencer ma nouvelle école d’illustratrice. Ce genre de décision ne peut pas venir de l’extérieur. Si je n’avais pas été certaine à l’intérieur de moi, mon entourage m’aurait dissuadé.

Peux-tu nous parler de ta première BD « Le syndrome de l’imposteur : parcours d’une interne en psychiatrie » ?

syndrome de limposteur

C’est une autofiction, inspirée de mon premier semestre d’interne en unité pour malades difficiles. Elle parle à la fois du syndrome de l’imposteur, du sentiment d’illégitimité, de ne pas se sentir à la hauteur…Je trouvais ça marrant de parler de ce sujet en le rapportant à la psychiatrie : d’analyser ce syndrome de l’imposteur chez le personnage principal de la bd (mon double) comme on peut analyser les troubles psychiques des patients en psychiatrie. Les médecins donnent souvent l’impression d’avoir une sorte de « savoir tout puissant » alors que lorsque j’ai débuté j’ai vraiment ressenti ce syndrome. Je pense que beaucoup de jeunes internes sont touchés par ce sentiment d’illégitimité au début et je décris donc leur quotidien (premières gardes, l’ambiance des services hospitaliers) en essayant de dédramatiser et d’en rire.

J’évoque également l’unité pour malades difficiles où sont hospitalisés des patients potentiellement dangereux. J’essaye d’expliquer comment les patients peuvent arriver dans cette unité en tentant de déstigmatiser leur violence supposée. Je parle des idées reçues autour de la folie. C’est à la fois didactique et humoristique, avec beaucoup d’autodérision.

Tu as une prochaine BD dans les tiroirs ? Où trouves-tu tes idées hormis ta propre expérience avec la psychiatrie ?

La 2ème BD est un recueil sur des maladies mentales imaginaires. C’est sur un ton un peu absurde. Je me suis amusée à aller dans l’imagination.

Ce sont les situations dans la vie de tous les jours qui me donnent des idées. J’aime bien vagabonder un peu et je trouve des idées comme ça…

Quel est le message que tu souhaites transmettre à travers tes BD ?

Il y en a plusieurs. En premier, je souhaite inviter les lecteurs dans une monde qu’ils ne connaissent pas. La psychiatrie travaille en huis-clos, les gens à l’extérieur ne connaissent pas vraiment la maladie mentale et en ont peur. J’aimerais bien que la société soit plus ouverte à l’égard de ceux qui souffrent d’une maladie mentale. J’ai aussi envie de dire que tout le monde peut expérimenter le syndrome de l’imposteur…même les médecins qui ont en apparence un profil très impressionnant. Enfin, j’ai envie que ce soit un bon moment de lecture pour faire rire les gens.

En savoir plus sur Claire Le Men et sa BD…

Découvrez la BD de Claire aux Editions La découverte ICI et le site de Claire

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L’équipe de l’Optimisme les histoires incroyables, les reconversions improbables et nous les mettons en avant. Découvrez la passion de Sophie, chauffeure Uber.

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Propos recueillis par Eva Mazur.

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